Masqué
Masqué
-50%
Le deal à ne pas rater :
-50% Baskets Nike Air Huarache Runner
69.99 € 139.99 €
Voir le deal

19h15 - Au balcon d'un Roi de l'ouest (terminé)
Dim 3 Mai - 15:27
Jildazig de Farheg
Jildazig de Farheg
32
Il était une foi
L'orage s'écartait, la tempête se calmait. Si le soleil n'avait pas encore fait son apparition sur le visage de la jeune femme, il n'en demeurait pas moins qu'elle paraissait déjà moins sur la défensive. Jil se mettait rarement en colère. Il n'aimait pas la colère. La colère rendait aveugle. La colère était source d'erreurs. La colère était source de guerre et de malheur. Lorsqu'il était en colère, Jildazig préférait s'isoler pour la digérer aussi longtemps que cela lui était nécessaire.
Pour autant, il n'en était pas homme à éviter les conflits ou à s'aplatir face à la première adversité. Il préférait simplement prendre le recul nécessaire pour juger d'une situation avant d'agir. Cela lui permettait de trouver les mots qu'il fallait afin de solver le problème qui s'avérait bien souvent être la source d'une mauvaise communication de toute part.

Ah une éclaircie apparut! Le conteur lui rendit son sourire, l'invitant par la même occasion à poursuivre d'une voix désormais presque timide. Il acquiesça lentement au sujet de son manteau, se gardant bien de lui rappeler que ces dames ne devaient certainement pas le considérer comme distingué

- Voilà une excellente suggestion, jeune Eïdys! Allons profiter de la vue sur les jardins et d'un air plus frais. Il parait que les jasmins étoilés laissent flotter dans l'air une douce fragrance florale.

La vieille branche qu'il était se hissa sur ses deux racines non sans un craquement. Ah veillir ne faisait jamais du bien. Il était loin désormais le temps où il était inarrêtable et vif comme l'éclair. Seul son esprit ne semblait pas encore avoir été touché par les vicissitudes du temps. Son bras s'enroula autour du sien: on ne refusait jamais un peu d'aide présenté de si bonne grâce, c'était toujours fort déplaisant. Il l'écouta attentivement parler de sa mission diplomatique tandis qu'ils se dirigeaient vers l'une des portes fenêtres donnant sur un immense balcon qui surplombaient les jardins et ses magnifiques bassins.

- On ne choisit ni ses voisins, ni sa famille. Il est parfois bon de nouer de bonnes relations aussi tôt que possible. La Guerre n'est jamais profitable à qui que ce soit, vainqueur comme vaincu et ne fait qu'attiser le désir de revanche. Une bonne alliance est toujours préférable. Je ne peux que vous enjoindre de rencontrer son Altesse au cours de la soirée. On la dit à ouvert l'esprit vif.

Arrivés au niveau de la balustrade de pierre, tous deux s'appuyèrent afin d'observer le décor si... ordonné qui s'étalait à perte de vue dans les dernières lueurs du crépuscule.

-Et bien, je voyage depuis que j'ai votre âge à peu près. J'ai traversé tout le continent de part en part. Je continuerai de marcher aussi longtemps que mes trois jambes me porteront. Avec trois c'est plus simple qu'avec deux non? conclut-il d'un clin d'oeil.


Il ne put que noter le parallèle entre le jour faiblissant et sa propre existence. Bientôt la nuit arriverait mais si demain le soleil se lèverait à nouveaux sur les jardins du Palais, lui, contemplait peut-être sa dernière nuit. Qui pouvait le savoir?
Re: 19h15 - Au balcon d'un Roi de l'ouest (terminé)
Dim 3 Mai - 22:55
Eïdys Snarfsdóttir
Eïdys Snarfsdóttir
28
La Main de Fer
La Guerrière fut ravie que Jil accepte son offre. D’abords pour qu’il puisse changer ce rouge écrevisse, qui lui était monté à la tête au fil du temps passé au banquet, en un teint plus blanc rassurant. Mais également car, effectivement, le cuir n’était pas connu comme un matériau permettant une bonne aération. L’extérieur leur ferait du bien à tout deux. Le bras tremblant du vieillard sous le sien et elle fit de son mieux pour le soutenir. (Le plus difficile était de marcher à son rythme et non réellement de l’aider à avancer, elle aurait pu le porter elle même jusqu’aux balcons.)

Oui, ils avaient opté pour les étages et un de ces balcons fleuris. Le choix était parfait, elle allait pouvoir garder un œil sur la salle. Plus loin elle aperçu Mild’ prés du pied de l’escalier opposé, tentant de se cacher au mieux derrière une colonnade. Elle lui fit un signe discret pouvant se traduire par un "Naah, mais c’est bon, déstresse meuf". (Un usage estanais de toute évidence.) Concernant les fleurs, Eïdys était plus dubitative. Elle n’avait pas ce qu’on pourrait appeler la fibre bucolique. Le lieu n’en était pas moins spectaculaire, mais elle sentait qu’elle n’y était pas si sensible qu’elle aurait du.

Ils reprirent leur discussion, ici, sous un air frais qui s’engouffrait dans la salle bondée. Choc thermique. À l’image des tempéraments de la jeunesse et de la vieillesse dont ils étaient, en cet instant, les représentants.

- La différence c’est que la famille nous choisit. Les voisins, eux, restent des étrangers. Esprit clanique, tout ce qu’il y a de plus naturel. Mais, je pense, que vous devez avoir une grande famille avec ce principe là. Les guerres n’ont en effet aucune importance pour un vagabond, vous avez tout loisir d’avoir en allié le monde entier. Pour ce qu’il est de son Altesse, elle haussa un sourcil, vous parlez duquel ? Le père, le fils ? J’appréciai parler aux deux. Le présent comme le futur sont importants. Et le passé de vos voyages m’intéresse également. Quel coin de notre petit monde avez vous le plus aimé ? Je ne pense pas que notre est et ses plaines pauvre en…

Elle sembla chercher un moment un mot qui pourrait plaire au vieil homme, avant de sortir, avec une moue déçue, un petit «verdure» du bout des lèvres.

- ... soit le meilleur endroit selon vous.

Elle avait quitté la contemplation des haies taillées pour se retourner vers la salle, adossée à la rambarde. Contrôle. Respiration. Aucune trace de colère. C’était mieux. Elle ne put retenir un sourire de satisfaction. Ces journées entières à observer les diplomates et commerçants dans son petit clan natal se montraient utiles quand elle arrivait à se ménager.
Re: 19h15 - Au balcon d'un Roi de l'ouest (terminé)
Lun 4 Mai - 23:34
Jildazig de Farheg
Jildazig de Farheg
32
Il était une foi
Jildazig respirait enfin. Loin de la cohue et des corps transpirants qui s'agglutinaient les uns contre les autres. Le conteur est un homme sociable et qui apprécie la compagnie de son prochain mais ces festivités étaient un peu trop extrême pour lui. La faute à son âge qui ne cessait sans doute d'avancer.

Bah tout cela sera bientôt derrière moi! songea-t-il avec philosophie tout en écoutant la réponse de la jeune femme.

Ils devaient sans aucun doute former un drôle de duo accoudés qu'ils étaient sur la balustrade, lui le vieillard et elle, la jeune "barbare".

Il afficha un grand sourire lorsqu'elle évoqua ses voyages mais ne la coupa pour autant. Il la laissa dérouler le fil de ses pensées, peu importe qu'elles se suivent ou non dans une certaine cohérence.

Lorsque ce fut à son tour, il ne put s'empêcher de remarquer avec plaisir ce petit sourire qui était né sur ses lèvres rosées.

- Puisque vous êtes ici en mission diplomatique, permettez-moi de vous éclairer quelque peu sur l'étiquette Oh combien tatillonne de ce pays.

Il eut un petit sourire moqueur, non pas envers elle mais envers ces lourdes règles de politesses et de respects derrière lesquelles la noblesse et la monarchie aimaient à se cacher pour se distinguer du petit peuple.

- Notre Roi est désigné sous le terme de Sa Majesté ou de Sir, une fois la discussion débutée. A l'inverse, si. Héritier est appelé Altesse. Considérez ça comme un petit guide de survie diplomatique. Lioffel XX n'est pas connu pour son ouverture d'esprit aussi et à moins de cvenir avec quelques choses qui l'interesserait, il ne fera pas grand cas de votre venu. Vous êtes avec lui ou contre lui. En revanche, on dit du Prince Tadriel qu'il brille par son esprit et tient bien plus de sa mère. Certains médisants osent même suggérer que Sa Majesté ne serait pas le père tant les deux sont si différents !

Ses sourcils broussailleux se froncèrent. Il ne croyait pas une seul seconde à ces ragots mais ces bruits qui couraient étaient toujours dangereux lors d'une succession.

- Je ne saurais vous répondre pour mon lieu favori: les côtes déchiquetées de Monosen sont une vraie merveille de même que la mer de glace birlaise. Imaginez donc... Une étendue de glace et de neige.. à perte de vue... Le désert des Terres du Sud est simplement magique, changeant au gré de la luminosité variant du beige à l'ocre, ponctué d'oasis luxuriante. Et je n'ai jamais vu plus belles plaines que celles de l'Est, une mer d'herbes folles ondulant sous la brise... Malgré mes voyages, Lioffel restera pour toujours ma terre natale et à ce titre sa forêt me procure toujours un plaisant réconfort. Et vous qu'en pensez-vous ? Est-ce votre premier voyage hors de vos contrées ?

Il avait laissé les jardins pour se concentrer sur son interlocutrice. Cette soirée était réellement pleines de formidables rencontres en tout genre.
Re: 19h15 - Au balcon d'un Roi de l'ouest (terminé)
Mar 5 Mai - 6:02
Eïdys Snarfsdóttir
Eïdys Snarfsdóttir
28
La Main de Fer
Le vieil homme parlait beaucoup… A chaque phrase elle aurait voulu l’arrêter, le questionner ou bien lui répondre. Mais, élève assidue, elle resta à le regarder, balançant sa tête au rythme de sa prosodie d’un air entendu avec dans les yeux une certaine soif d’apprendre.
L’étiquette, elle en connaissant certaines ficelles,  mais ô combien c’était ennuyeux. Ennuyeux de tâcher d’opprobre une relation uniquement à cause de quelques miettes, de deux ou trois mots mal placés. Alors qu’il était au contraire si simple de froisser à dessein… Bien que, dans les deux cas, il dépendait d’avec qui l’on était en discussion.

- Si mes premiers mots ne sauront intéresser Sa Majesté, légère accentuation sur le terme, afin de bien démonter qu’elle avait intégré la leçon et qu’elle en ferait usage, alors ce sera juste une rencontre pour lui présenter les hommages d’une représentante de l’Est. C’est aussi de coutume par ici, je crois. Quant à Son Altesse, si il n’est pas trop occupé à repousser ses prétendantes, nous parleront… Elle laissa planer un instant, pensive, avant de conclure. Merci encore pour cet enseignement, Jildazig.

Le voyageur adorait parler des contrés qu’il avait exploré, chaque paysage semblait encré en lui et il avait l’envie de les partager. Elle, guerrière sanguinaire, avait également fait quelques voyages. Mais des steppes, des regs et des dunes qu’elle avait foulée elle s’enquérait d’abords des ressources dont elles regorgeaient. La beauté qui animait le regard brumeux de l’aimable homme elle ne la comprenait pas entièrement. L’observation était pour ceux qui avaient le temps. Surtout ceux qui le prenaient. Et la femme de guerre ne prenait pas le temps. Mais la question du vieil homme la dérangeait, peut-être lui aurait-elle répondu hardiment si il l’avait posé plus tôt, mais a présent qu’Eïdys savait de quel genre il était… lui confier qu’une estanaise avait passé la frontière du Sud ? Il n’était pas idiot. Quels intérêts y avait-il à faire un tel périple ? L’homme de temps n’appréciait pas la guerre, soit. Elle appréciait, de son coté, Jil. Alors… elle le ménagerait. Nul mensonge, mais les vérités qui pourraient brusquer resteront voilés.

- La moitié des lieux que vous voulez me faire imaginer me sont inaccessibles, malheureusement. Je vois avec quelle joie vous en parlez, ils donnent envie rien qu’à vous entendre… Je connais l’Est, ses bosquets éparses, ses herbes hautes, ses marais salants. A présent, depuis plus d’un mois que je parcours votre pays, je peux me rendre compte de l’atmosphère des forets Lioffeloises, et des villes surtout. C’est un autre monde. Et, étrangère, je comprends ce sentiment que peut donner le retour aux sources. J’ai moi même hâte de pouvoir rentrer. Mais… (elle fit signe à un serveur de s’approcher, qui le fit d’un pas légèrement hésitant) je vais apprécier les plaisirs de ce voyage avant.

Elle prit deux verre d’une main, en posa un sur le rebord du balcon prés du vieil homme – sans même lui proposer, si il ne le prenait pas elle l’ingurgiterait plus tard – et porta immédiatement le second à ses lèvres. C’était un vin blanc… fort en arôme, faible en goût. Elle avait bu plus alcoolisé à son mariage. Et, là, une illumination… qui disait voyage, disait souvenir. Elle même y avait bien cédé une fois déjà. Alors un vagabond de longue date devait en être bardé.

-  De ces errances vous avez gardés des souvenirs ?… Matériels j’entends.

Eïdys retenu dans un coin de sa tête l’idée de prendre un petit quelque chose avant de rentrer. Une chose étrange dont on ne fessait pas commerce. Elle ne savait pas encore quoi, mais elle avait bien le temps.
Re: 19h15 - Au balcon d'un Roi de l'ouest (terminé)
Mar 5 Mai - 20:31
Jildazig de Farheg
Jildazig de Farheg
32
Il était une foi
Jil inclina la tête lorsqu'elle le remercia de ce précieux enseignement. C'était la moindre des choses qu'il pouvait faire. Il savait oh combien certains pouvaient être tatillons alors quand en plus on venait d'un pays de barbares... Mieux valait adopter la civilisation locale si l'on pouvait dire.

Il n'avait pas manqué de voir que sa question l'avait quelque peu dérangé ou étonné. Il était bien difficile de faire la part des choses. Il n'y avait pourtant aucun piège derrière cette question. Oui, elle avait sans doute franchi la frontière. Indubitablement. Peut-être même récemment. Peut-être même qu'elle avait participer au massacre de ses amis.

Une fugace lueur de tristesse traversa son regard tandis qu'il l'écoutait toujours aussi attentivement.

- Vous pourriez parfaitement voyager si l’envie vous prenez jeune Eïdys. Il suffit dans s'en donner les moyens. J'ai moi-même renoncé à mon titre il y a bien longtemps au profit de mon frère cadet pour pouvoir vivre la vie que que je mène actuellement. Et jamais je n'ai regretté ce choix. Vous savez, je crois que c’est le plus important : vivre sans regret. Je pourrais mourir demain que je serai satisfait de l’existence que j’ai pu mener. Enfin… Il me reste tout de même quelques questions existentielles insolubles mais n’est-ce pas le propre de ces interrogations que de demeurer sans réponse ?

A peine eût-il terminé qu’elle déposait de verre de vin blanc sur le rebord du balcon. Son péché mignon pour tout dire.  Ce goût fruité allant jusqu'au sirupeux suivant les cépages. Il hésita un instant avant de s'en saisir. Si jamais ce devait être sa dernière soirée autant en profiter jusqu'au bout et tant pis pour les migraines ! Il porta la coupe à ses lèvres. Un pur ravissement, très rond en bouche, il pouvait ressentir les rayons du soleil qui avaient baigné de leur lumière chaque petit globe d'or. Il aurait eu bien tord de s'en priver et écouta la question suivante.

Les mâchoires de Jil se serrèrent et son regard se perdit un instant dans l’infinité végétale des jardins, avant d'offrir sa réponse, toujours accompagné de son bienveillant sourire mais cette fois-ci d'un regard bien moins pétillant.

- Je n'ai que cette canne fabriquée par un ami monosianais et ce chapelet

Il prit entre ses doigts, faisant glisser les perles une à une, les yeux clos. Un geste mécanique qui ne manquait jamais de lui offrir autant de réconfort que d'apaisement.

- C'est un objet traditionnel qui m'a été offert par le chamane du clan Yod.

L’émotion de la récente nouvelle est encore présente et il lui était difficile de la masquer, y compris cacher sous son masque de hibou.

- Les perles sont creuses afin de contenir des poisons pour la chasse par exemple ou des remèdes. Car les plantes peuvent bien souvent faire les deux n'est-ce pas ? Tenez, voyez par exemple, le mien est remplit de ciguë afin d'apaiser les migraines et autres vieilleries.

Il reprit une petite gorgée. Ils avaient tous périt. Tous. Ainsi allait la vie. Ainsi allait la guerre dans son absurdité et sa violence la plus totale.


Dernière édition par Jildazig de Farheg le Mer 6 Mai - 6:45, édité 1 fois
Re: 19h15 - Au balcon d'un Roi de l'ouest (terminé)
Mer 6 Mai - 5:55
Eïdys Snarfsdóttir
Eïdys Snarfsdóttir
28
La Main de Fer
Abandonner son clan ? Ses responsabilités ? Eïdys avait levé la tête. Qu’était-ce ? Un parjure ? Il y avait là les ramassis d’insalubrités d’un médiocre. Elle avait fermé les yeux en se concentrant sur sa respiration. Si était là le prix des voyages alors aucun des siens ne l’accepterais. D’un autre coté c’était cette mentalité qui avait fait de l’Est l’état grégaire qu’il était. Ce n’était pas une bonne chose, le nombre d’opportunité loupé qui en avait découlé ? Une question sans réponse, mais qui n’avait rien à voir avec l’existence même. Proche des vertiges métaphysiques, dont elle ignorait presque l’entièreté, – si tant est-il qu’il puisse y avoir une entièreté à ces choses là – elle avait juste laissé échapper naturellement un « Bah, oui sans doute » en rouvrant les yeux.

Elle lui fit un de ces large sourire de camarade de comptoir, lorsqu’il prit sa première gorgée. Boire ensemble, était un pas vers une "amitié", au moins d’apparence. Tout les opposait et qu’importe les appréciations de l’un et de l’autre, hors de cette fête, ils ne se seraient jamais parlé. Ce n’était qu’un concert de circonstance.

- Sachez que je comptes bien vivre sans regret. Lorsque la mort viendra me trouver je l’affronterais, jusqu’à ma fin.

Une simple façon direct de lui rappeler les mœurs Estanaises vis-à-vis de la guerre et de l’honneur qu’elle apporte.

Offense, Colère, Guerre. La Déesse le rappelle : Puisse la mort être au milieu de plumes grises et du sang ennemi.

- Il vaut mieux ne pas trop se poser de question qui ne peuvent avoir de réponse. Je privilégie toujours ce qu’il y a de plus concret. L’état du monde est à prendre tel qu’il est.

L’étrangère continua de boire, prenant par la même une pause. Elle avait évoqué les souvenirs en toute légèreté, mais voilà que Jildazig semblait se refermer. Patiente et vigilante, elle attendit sa réponse.

Du monosen, elle ne connaissait que peu et la description de la canne restait évasive.

Le préambule était achevé. Il annonçait trois coups. Chacun plus grave que le précédent.

Du chapelet… signe d’apaisement pour le voyageur, il y avait à nouveau ce sentiment de déjà-vu.

Son regard suivit celui de l’homme qui lui fessait face, se ternissant, mais restant braqué sur lui.

Du clan Yod…… c’était là qu’elle avait vu l’un de ces étranges colliers… Yod, un nom écœurant. Le souvenir d’un déshonneur à deux faces. D’un coté, ses pairs morts en vain, loin du champ de bataille. Et de l’autre… des villageois, des civils, des charognes, offerts en pâture aux busards et autres vautours.

Eïdys reposa son verre sur le balcon pour mieux serrer le poing.

Du poison……… c’était là un des mots les plus cinglants à l’oreille de la vengeresse, porteur des pires éclats des souvenirs sus-remémorés. Ses sœurs, ses frères, langue bleu pendante après une courte mais violente agonie. Leurs sueurs qui n’en finissaient pas d’être épongés. Leurs respirations hachés avec douleur. Leurs sangs crachés jusqu’à l’exsangue. Leurs râles arme à la main répudiés.

S’insinuait dans les veines de la jeune femme une fureur renouvelée. Un état de trans ou chaque battement du cœur s’étendait de la poitrine à l’être entier. Une chaleur que l’air frais ne pouvait atténuer. Un venin qui pouvait s’avérer tout aussi fatal qu’une eau dénaturée. Et tout son corps se tendit sous son long manteau. Curieusement il lui sembla entendre l’homme continuer de parler. Au loin. Un mot se détacha : « apaiser »… Il amena son verre à sa bouche. Il avait fini.

Une rupture a lieu. Psychique et physique. (Et peut-être stylistique.) Un bruit se fait entendre.

L’éclat pétillant dans les yeux de partenaire de beuverie ? N’était plus. Le verre lui-même qui avait recueillit le breuvage ? N’était plus. La rambarde de pierre couverte de lierre de ce balcon-ci ? N’était plus. (Plus complète du moins.) Une lourde main de fer jusqu’alors immobile, si ce n’était pour accompagner le corps lors de la marche, venait de briser chacun.
Un déshonneur pour un déshonneur, trois coups pour trois coups. C’était la loi de Seaka aux ailes grises.

Se rapprochant pour éviter de hurler, les yeux fustigeant le vieillard qui n’y était pour rien, elle le sécha froidement :

- Vous connaissez bien ces fielleux des déserts ? Et en êtes bon ami ? J’avais quelques doutes, me voilà assurée. Oh, étiez, c’est vrai, vraiment désolé. Vous êtes tombé…

Ce fut à ce moment qu’une masse sombre fila coté jardin, du toit vers le sol, s’achevant dans un choc sourd. La guerrière s’arrêta, jeta un œil en contrebas et y distingua les contours vagues de deux corps enchevêtrés, puis reprit comme si il était là chose tout à fait normal. Cela ne fit que mettre en exergue la gravité de la situation.

- … dans un nid de vipère avilie, hybride de sangsue galeuse, et en êtes ressorti avec de petits cailloux autour du cou ? Bien. Savez-vous seulement ce que ces fennecs puants nous ont fait pour subir nos nuées, et que nous leur passions une corde autour du leur, de cou ? Ils ont empoissonnés, privant de bien plus que leurs vies, des centaines de braves guerriers… Où est la guerre honorable ? Je n’aime pas tuer ceux qui n’ont pas d’arme, mais le litige était majeur ! Et à présent… à présent !? Un mariage pour nous rabibocher !?…

Après avoir laissé flotter un instant, ne se calmant pas, elle se retourna et parti poussant quiconque se trouvait sur son chemin. L’atmosphère se détendit derrière elle. La réputation des Estanais en ces lieux était compromise auprès d’une vingtaine de convive, et le temps que le bouche-à-oreille fasse son office ce serait toute la salle qui pourrait avoir connaissance de son coup de sang.

Qu'ai-je donc fait, rugit la guerrière intérieurement.
Re: 19h15 - Au balcon d'un Roi de l'ouest (terminé)
Mer 6 Mai - 14:24
Jildazig de Farheg
Jildazig de Farheg
32
Il était une foi
Les estanais et leur vision de la mort... Jil chérissait la vie parce que la mort existait. Il la chérissait parce qu'elle pouvait prendre fin du jour au lendemain et depuis sept décennies, il l'avait bien compris. Combien de fois avait-il faillit y rester? Bien trop. Voyager était souvent périlleux. Voyager seul était un brin suicidaire. Pour autant, le vagabond ne serait jamais allé au devant la mort pour le plaisir de mourir. Non, il tenait bien trop à la vie pour cela.

Il était vain de présenter à la jeune femme les choses différemment. La culture de l'autre devait être respectée, quand bien même elle était à l'opposé de la notre. La différence ne faisait pas d'une chose qu'elle était meilleure ou moins bonne. Non c'était plus comme... Contempler un objet d'un angle différent, d'une autre perspective.

Parole de sagesse d'ailleurs que de prendre le monde comme il venait.

Il acquiesça. Pourtant, bien rapidement, elle oublia cette sage déclaration qu'elle venait de prononcer.

L'évocation des sudistes déchaîna une tempête.

Verre brisé, vin qui se répandit sur la balustrade et goutta au sol.
Jil contempla les vestiges de leur amitié naissante. Au moins le vin était blanc et non rouge.

Il la laissa déverser sa cascade de paroles acerbes sur ses épaules de vieillard. Jil regretta subitement de ne pas être sourd. Il aurait préféré ne rien entendre de tout cela mais la nature avait décidé de lui laisser son ouïe quasi intacte.
Il écouta donc chaque goutte d'acide venin qui le heurtait. Il ne s'aperçut même pas de la masse sombre qui venait de se diriger vers les jardins.

Simplement une question de perspective

Il n'était pas en colère contre elle, il était simplement peiné. C'était bien pour cela qu'il détestait tant la guerre: elle n'engendrait que rage et violence dans un cycle infini si bien que l'on oubliait pourquoi elle avait réellement commencé. Il ne put s'empêcher un parallèle avec Birla. Dire qu'il avait connu la paix... Cela semblait désormais dans une autre vie.

Ses yeux voilés regardaient dans le vide. Il n'était plus vraiment dans son corps qu'il avait laissé sous la colère de la jeune Eïdys. Lorsque le flot s'arrêta enfin, elle resta silencieuse quelques instants, mais le vieux conteur vit dans son regard qu'il était inutile d'entamer la conversation. Peu de temps après, elle fit volte-face et l'abandonna sur le balcon.
Re: 19h15 - Au balcon d'un Roi de l'ouest (terminé)
Contenu sponsorisé

Sauter vers: