Amylia se sentait à la fois au bord du rire et de la frustration.

Premièrement, le garde, plutôt mignon, s'était arrêté quelques instants en la regardant avant de s'occuper de Sily. Il avait littéralement tripoté son frère, des pieds à la tête. Avaient-ils vraiment le droit de faire glisser leurs grosses mains ainsi sur le corps de tous les gens qui venaient ici ? Elle avait eu une petite appréhension pour elle-même, finalement, cela risquait d'être peu agréable de sentir des grosses paluches sur son corps car il touchait vraiment. C'était pas seulement des effleurements. Il donnait des petites tapes à espace régulier, rien de bien transcendant  en fin de compte. Bien loin de tous ses fantasmes. Comment allait-il s'y prendre pour ses jambes ? Allait-il s'incruster sous sa robe ? Les mains seulement ou serait-il obligé de passer sous sa robe pour pouvoir toucher ses jambes ? Elle l'imaginait devoir passer à quatre pattes pour accéder à ses jambes. Ridicule et parfaitement gênant. Car dans ce cas, il allait voir ses dessous... quelle indécence ! Elle était sûre d'être toute rouge à cette idée. Elle regarda au loin et vit une autre dame se faire fouiller par un autre garde... Elle soupira d'aise. Les cerceaux mettaient une distance entre le garde et les jambes de la dame. Il avait les mains sous la robe certes mais il ne devait pas pouvoir accéder à plus haut que ses mollets... une chance !

Le garde conclut que la fouille de Sily était terminé et il avait passé le test avec succès. Son expression à son encontre s'était adoucie. Qu'avait-il imaginé concernant son frère ? voyons, une personne aussi droite. Il se tourna alors vers elle avec un large sourire. Elle se rendit alors compte qu'il avait passé beaucoup de temps à l'observer en lui lançant beaucoup de sourire qu'elle lui avait rendu avec un grand plaisir. Sauf peut-être quand elle l'avait imaginé sous ses jupons. Il avait passé ses mains sur ses chevilles.... qu'est-ce que cela pouvait chatouiller ? Quand il tata ses mollets, elle se pressa contre lui, un peu à la manière de la dame, et sans comprendre pourquoi, elle vit du rose sur les joues du garde. Il s'écarta plus vite que ce qu'elle aurait pu penser et il posa ses mains sur sa taille pour entreprendre la fouille de son buste. Elle le détourna jamais les yeux de lui alors que lui levait les yeux au ciel. Elle se redressa pour essayer de sentir ses mains sur elle mais c'était bien décevant tout cela.
Soudain, tout s'arrêta et il posa sur elle un air suspicieux. Elle lui rendit un sourire sans comprendre ce qui se passait.

- Mademoiselle, donnez-moi tout ce que vous cachez dans votre corsage, je vous prie. Vous ne pouvez rentrer avec cela.
- Que voulez-vous dire ? Je ne cache rien.

Sans rien dire, il insista.
- Amylia, qu'as-tu encore fait ? Tu as mis des objets dans son corsage ?
- Bah, non !... Enfin si ! Juste au cas où cela me gratterait.
- Je ne veux rien savoir ! Donne immédiatement tous les objets que tu as mis dans ton corsage !
- Même les baleines ?
- Même les baleines !
- Même le coupe papier ?
- Que voulais-tu faire avec un coup papier ?
- Ça sert à plein de truc un coupe papier.  Imagine que j'ai un fil qui dépasse sur ma robe, cela ferait désordre, que je me coince un arceau dans un rosier, ou pire, imagine que je ne trouve pas de couteau pour goûter tous les plats.
Il maugréa.
- C'est bon... Donne tout ce que tu as !... Excusez-la, elle imagine qu'elle est dans le manoir de son enfance. Elle ne se rend pas compte qu'elle est à la cour.
- Vous pourrez passer les reprendre en fin de soirée. Vous pouvez y aller, passez un agréable bal.

Ils s'éloignèrent. Sily se tenait droit comme un i et marchait à grand pas. Amylia savait qu'il n'était pas content mais elle ne comprenait pas pourquoi il était en colère. Elle essayait de se tenir à sa hauteur non sans peine. Soudain, alors qu'ils étaient éloignés des autres convives, il s'arrêta et se tourna vers elle. Elle lui offrit le plus beau de ses sourires. Elle cligna des yeux pour l'attendrir. Rien n'y fit. Alors elle soupira et fit une moue boudeuse. Il allait la gronder encore une fois... elle en avait marre de ses remontrances.

- Amylia, tu te rends compte que tu fais partie des suspects maintenant. Tu as vu comme il a souligné ton nom. Cela ne me dit rien qui vaille. A partir de maintenant, tu resteras à côté de moi et tu me demanderas l'autorisation de faire quoi que ce soit. Si j'estime que cela est sans risque, je t'autoriserai à faire ce que tu as envie mais si à la moindre incartade, je sens que tu ne m'obéis pas, je te ramène à la maison et je t'y enferme à double tour. C'est compris !
- Oui.... je pourrais quand même aller me soulager si j'ai envie ?
- Nous verrons.
- Et si j'ai faim ?
- Nous verrons.
- Et si j'ai la possibilité de danser avec le Prince ?
- Nous verrooons.
- Tu ne sais dire que cela. Tu n'es vraiment pas marrant, comme frère. Je vais voir si je peux pas en trouver un autre.
- Amylia, c'est pour ton bien. Je ne veux que ton bien... Je sais que c'est important pour toi d'être là et de voir le Prince.
- De voir les beaux gens de la cour, de goûter aux succulents plats, de tout savoir sur la cour, de danser, de me promener dans les jardins, de
- Oui, je sais tout cela, nous en avons parlé. Je te promet que je te montrerais tout ce que tu veux mais il faudra m'obéir et ne pas t'éloigner de moi. C'est compris ?
- Même les salons privés et les bibliothèques ?
- Oui. As-tu compris ce que je t'ai dis ?
- Bien-sûr ! Tu m'emmèneras voir les jardins aussi, je veux voir tous les plus beaux lieux.
- Amylia, promets moi que tu m'obéiras.
- Oui tout ce que tu voudras. Je te le jure sur la tête de... Finey.
- D'accord, sur la tête de Finey. Je m'en contenterai.
- C'est une belle promesse sur la tête de Finey.
- D'accord, d'accord, je te crois.

Amylia lui fit son plus beau sourire. Elle lui avait promis qu'elle ne lui sauterait pas au coup quelque soit son contentement alors elle se retint. C'était un peu dur de résister mais elle avait promis alors une promesse est une promesse. Bon d'accord, une promesse sur la tête de Finey n'était pas la plus sincère des promesses. Mais elle n'allait pas lui promettre de lui obéir en tout point alors qu'elle savait déjà qu'il ne lui autoriserait pas à faire tout ce qu'elle voulait. Elle allait filer doux un petit moment pour le rassurer et lui permettre de se détendre et...

A la première occasion, elle s'éclipserait.

Elle observa autour d'elle afin de repérer tous les bons endroits où elle pourrait se cacher, se mettre hors de sa vue s'il la cherchait ou s'il passait pas loin d'elle.
Les Tentures, volumineuses et à espace régulier seraient faciles à atteindre si besoin. Il y aurait probablement tout un monde qui pourrait s'ouvrir à elle. Derrière, elle imaginait des portes secrètes et passages.
Le Buffet, avec sa grand table couverte d'un drap immaculé serait une merveilleuse cachette. Et elle pourrait subvenir à ses besoins autant qu'elle le voudrait. Il ne serait pas là pour lui dire que la gourmandise était un vilain défaut.
Le Balcon, avec sa pénombre et ses petites cachettes que ses petits yeux habitués à en chercher serait une astucieuse solution.
Elle pourrait peut-être aussi se cacher derrière certaines personnes, elle était suffisamment menue pour cela même si sa robe ne l'était pas trop elle. Mais elle avait déjà remarqué que beaucoup portait des couleurs similaires.

- Arrête d'enlever ton masque comme cela, Amylia.
- Pardon, Sily.

Tadriel n'avait strictement aucune envie de participer à ce maudit bal et à toutes ces réjouissances où il devrait sourire à tout bout de champ. Il ne comprenait même pas la manoeuvre de son père ! C'était un peu comme ouvrir les bras et hurler au monde : venez me tuer, je vous attends !

Mais le pire, outre la torture de devoir rencontrer toutes les jeunes femmes du pays qui allaient se pâmer à ses pieds, c'était l'idée d'ouvrir le bal. Ouvrir le bal, bon sang ! Mais qui avait eu cette idée merveilleuse, déjà ? Il en avait mal au ventre rien que d'y penser !

Danser seul, au bras d'une inconnue, au milieu du cercle des invités qui le regarderaient tous.

Non, décidément, cette soirée allait être la plus longue de sa vie. Il en avait déjà marre. Et il n'était que dix-huit heures ! Il s'arrêta devant la petite porte adjacente qui lui permettait d'éviter la foule. Seul point positif, il échappait déjà à l'entrée en grandes pompes, sous les fanfares des musiciens.

Il jeta un oeil dans le miroir, pour vérifier que tout était bon. Il réajusta la cape sur ses épaules, enfila le masque - avec un peu de chance, cela lui éviterait d'être reconnu au premier coup d'oeil par toutes les donzelles de la cour - et se redressa. Puis, il entra.

Il était encore tôt, tous les invités n'étaient sûrement pas entrés mais il ne doutait pas que la queue dehors devait encore être très importante et pourtant, la foule qui se massait dans la salle de bal était déjà dense. Les gens discutaient entre eux, tous masqués, tous habillés dans leurs plus beaux atours.  

Il pensa à toutes ces jeunes filles qui n'étaient sans doute venues que pour le voir lui, et qui étaient toutes folles d'amour pour un Prince qu'elles n'avaient jamais rencontré. Il était bien en mal de comprendre pourquoi !

Il s'engagea parmi la foule, le plus naturellement possible pour ne pas attirer l'attention sur lui. Bien sûr, c'était peine perdue, car quelques secondes plus tard, tout le monde s'inclinait et s'écartait pour le laisser passer.

Une véritable haie d'honneur.

Tout ce qu'il aurait voulu éviter.

Il attendit que les courtisans en aient marre de s'incliner et se redressent pour les remercier d'un signe de tête, comme le voulait l'étiquette, et continuer son chemin.

Il cherchait quelque chose à faire - peut-être trouver quelqu'un qui ne le reconnaîtrait pas ? -quand une voix pas très loin de lui attira son attention :

- Et si j'ai la possibilité de danser avec le Prince ?

Eh bien ! il y en avait une là.

Il hésita une seconde et puis... Il lui fallait bien quelqu'un pour danser, de toute manière, et il voulait éviter les cohues de jeunes femmes excitées. Autant aller au devant des problèmes, plutôt que d'attendre qu'ils arrivent d'eux-même.

Il s'approcha donc de la jeune femme.

- Mademoiselle, monsieur, dit-il en arrivant à leur niveau.

Il s'inclina pour les saluer et reprit :

- Je suis le Prince Tadriel. J'ai entendu que vous souhaiteriez danser avec moi...

Il eut un sourire. Il espérait juste que cette jeune femme savait se tenir un minimum et qu'elle n'allait pas s'évanouir à sa prochaine question.

- Qu'est-ce que vous diriez, chère mademoiselle, d'ouvrir le bal en ma compagnie ? Je cherchais justement une cavalière...

Lianelle déambule entre les convives, essayant de reconnaître les gens derrière leurs masque, ce qui est plus facile que ce qu'on pourrais croire. Bon elle lorgne aussi sur les décolletés des dames et est un peux déçu que les hommes ne prenne pas exemple sur les femmes et ne montre pas plus leur peaux. Stupide règle de bienséance. Et parmi toute ses convives elle repère deux proies délicieusement alléchante. Une jeune fille et son petit amis? Cousin? Frère? Quoi qu'il en soit les deux sont très intéressante, la fille semble assez facile a "attraper" le garçon par contre. Lianelle s'en lèche les lèvres. Il semble totalement inaccessible et ça c'est excitant, voyons si il est aussi difficile a décoincer qu'il semble en avoir l'air.
Mais la un individu vient gâcher sa chasse. Le prince rien que ça! 
Lianelle se dirige vers le trio qui a accaparer quasiment toute l'attention dans la pièce. Il est temps de mettre l'ambiance. Lianelle a un sourire carnassier. Cette soirée va être mortel de bien des façons.

-Ho non mon prince vous avez était plus rapide hé hé hé.

Lianelle brise la solennité du moment sans le moindre scrupule piétinant méticuleusement au passage une bonne dizaine de règle de bienséance.

-Je venais de les repérer tout les deux.

Elle se met derrière la fille et rehausse la poitrine de cette dernière.

-Il faut avouer qu'elle est petite mais elle est mimi quand même.

Puis elle se tourne vers le... frère, ça doit être son frère il y a quelque similitude entre les deux.

-Et puis que dire de cet bel étalon hé hé hé. Si vous ne m'aviez pas coupé l'herbe sous le pieds j'aurais bien tenter ma chance. Avec les deux en même temps HA HA HA HA.

Et elle dit tout ça en continuant de tenir la poitrine de la jeune fille. Lianelle regarde le prince droit dans les yeux avec un grand sourire elle a l'air de dire "alors mon prince comment allez vous vous sauver cette petite princesse?"

Ce bal était synonyme de travail acharné pour la Commandante des Manteaux Blancs. Plus que n'importe quel autre jour, elle ne laisserait rien au hasard ce soir. Tout était vérifié, surveillé, vérifié et contrôlé à nouveau. Si elle avait confiance en chacune des personnes du palais - à quelque chose près- cela ne l'empechait pas de mettre son grain de sel partout où la situation l'exigeait.
Elle avait donc passé ce début de soirée à arpenter le palais en aboyant remontrances et autres invectives à qui de droit. Une vraie furie blanche. A son passage les têtes se baissaient, les regards deviaient et les voix s'étouffaient. Qu'importe ! Il n'y avait que ceux qui ne faisaient rien qui n'avaient pas d'ennemis! Et la Commandante Varda n'aurait pas hésité une minute à se mettre à dos le palais si cela avait pu préserver le Prince.

Elle avait donc laissé Tadriel au bon soin de Mhilo le temps de s'acquitter de ses diverses tâches. Elle traversa l'imposante embrasure de la porte et pénétra dans la salle de bal qui commençait à se remplir un peu plus chaque minute qui passait.

Pauvre Tadriel... Lui qui a horreur des mondanités va devoir faire le grand plongeon et tenter de ne pas s'y noyer.

Elle scruta les invités. Elle n'y voyait que de potentiels assassins de cette jeune fille là bas au vieillard assis sur une chaise, en passant par cette délégation étrangère. Mais lequel passerait à l'attaque ce soir? C'était là toute la question.


Elle aperçut alors Tadriel, s'approchant de la jeune fille en question et se faufila afin de se mettre à la distance idéale : celle qui assurait au Prince une apparente liberté d'action tout en lui permettant d'intervenir immédiatement. Lianelle apparût, sortie de nulle part comme à sa détestable habitude. Varda grogna alors qu'elle commençait son spectacle et s'interposa aussitôt, sans même laisser à Tadriel l'occasion de répliquer. Car là n'était pas son rôle.

- Lianelle! Cesse d'importuner nos invités aboya-t-elle ses yeux dorés lançant des éclairs.

- Il paraît que sa Majesté en a fini avec le Général. Tu devrais sans doute aller le divertir après toutes ces tensions. lança-t-elle un brin sarcastique.

Lioffel et sa lubricité... Elle le perdra un jour. Elle regarda à nouveau la jeune femme
Je devrais sans doute me méfier d'avantage de ces dames tout compte fait...

- Veuillez excuser Lianelle... Ce n'est que "notre bouffon" royale. Les bonnes manières ne font pas partie de son registre conclut-elle en serrant les mâchoires.

- Mademoiselle, monsieur,

Un beau jeune homme, blond comme la paille, la peau lisse et merveilleuse. Son regard la fit fondre... Elle en était sûre, elle était déjà amoureuse de lui. C'était comme quand elle avait vu pour la première fois ce petit oiseau bleu blessé qu'elle avait ensuite pris sous son aile. Cela avait été le commencement d'un amour incommensurable qui perdurait encore aujourd'hui. Elle l'avait juste étendu à tous les oiseux qu'elle voyait. Et ils lui rendaient bien son amour. Si ce jeune homme pouvait être comme eux, elle serait comblée.

Il s'inclina pour les saluer.
Quelle gracieuse révérence ! Elle était déjà folle de lui...

- Je suis le Prince Tadriel. J'ai entendu que vous souhaiteriez danser avec moi...

Ses propos et peut-être encore plus son sourire la désarma. Elle était à peine arrivée qu'elle faisait déjà sa connaissance... et Il... Le Prince... Il lui adressait la parole.. Ses jambes sous sa robe s'agitèrent. Elle savait que cela ne se voyait pas alors elle les laissa piétiner, tout en souplesse, genoux pliés comme elle le faisait quand elle était trop contente mais qu'il fallait qu'elle ne fasse pas de bruit. Elle avait l'habitude d'exprimer sa joie ainsi. En apparence, elle gardait l'attitude noble mais sous les volumes de sa robe, elle pouvait bien s'exciter un peu, faire la folle. Sily n'en saurait jamais rien...

- Qu'est-ce que vous diriez, chère mademoiselle, d'ouvrir le bal en ma compagnie ? Je cherchais justement une cavalière...

Dieu, s'il existait... La chance, elle, elle existait et Amylia savait qu'elle y était abonnée... Elle était juste arrivée et elle était invitée à danser... Elle eut du mal à ne pas ajouter ses bras à l'agitation de ses jambes. Elle devait rester digne... elle devait faire honneur à Sily, à sa famille, au Prince... Elle devait faire honneur à personne, juste à elle. Elle ne devait pas se ridiculiser et faire impression. Elle cessa immédiatement de s'agiter en son fort intérieur et son l'alcôve de sa robe. Elle sentait sa poitrine monter et descendre à un rythme effréné. Sachant que sa respiration était absolument libre du fait du corset, trop serré, si elle continuait, elle allait s'évanouir.

Sily lui toucha la taille pour lui faire signe qu'elle devait répondre. Répondre quoi ? Qu'elle était ravie, qu'elle n'attendait que ça, ouiiiiiiiiii... non ce n'était sûrement pas la bonne formule.

-Ho non mon prince vous avez était plus rapide hé hé hé.
Qui que soit cette voix, elle l'avait sauvé, lui avait donné un répit pour trouver la réponse convenable, revoir dans toutes les leçons apprises, dans tous les conseils qu'on avait pu lui donner, quelle réponse elle allait donner dans ce cas particulier.

-Je venais de les repérer tout les deux.
Ola, c'est pas trop orthodoxe ça comme approche. Mais qu'est-ce qu'elle fait ? Elle est en train de me tripoter, ou quoi ? Totalement différent que ce qu'à fait le garde. Les petits tapotement s'étaient limités à ses flancs, il avait posé la tranche de sa main entre ses seins et c'est là qu'il avait senti le coupe papier. Totalement décevant comme toucher... Elle, car c'était bien une femme avec une voix pareille, elle était en train de remonter ses seins ne se rendant pas compte que le corset était un peu trop serré pour qu'elle sente réellement quelque chose. Dommage.
La vie est injuste....
-Et puis que dire de cet bel étalon hé hé hé. Si vous ne m'aviez pas coupé l'herbe sous le pieds j'aurais bien tenter ma chance. Avec les deux en même temps HA HA HA HA.

Parlait-elle de Sily ou du Prince car son frère en bel étalon... Pouah ! Son frère n'était pas vraiment ce qu'elle appelait un bel étalon alors que le Prince était le plus beau jeune homme qu'elle ait vu de toute sa vie. Pouvait-elle espérer l'intéresser réellement ? Si cela pouvait-être le cas, elle pourrait en rougir. Elle serait la plus heureuse des jeunes filles du monde.

- Lianelle! Cesse d'importuner nos invités

Amylia vit apparaître dans son champ de vision une femme toute blanche, le teint pale, les vêtements blancs, les cheveux blancs. Était-ce une teinture ou sa couleur naturelle ? Elle était belle dans son genre. Ses traits étaient fins en dépit de son expression un peu dure.

Quand je serais grande, je veux être comme elle ! Je suis sûre en plus qu'elle a une place importante... Le rêve ! Je pourrais peut-être m'en faire une amie, elle a l'air de bien connaître le Prince.

- Il paraît que sa Majesté en a fini avec le Général. Tu devrais sans doute aller le divertir après toutes ces tensions.

La pression et la chaleur des mains sur sa poitrine se firent moins forte. Amylia tenta de voir sa gentille agresseur pour voir comment elle était faite. Elle était habillée bizarrement mais c'était joli. Son ventre était menu et se voyait. Elle ne devait pas avoir toujours chaud et devait nécessiter un chaud manteau par temps de froid. Son attitude aussi était bizarre, Amylia n'en avait jamais eu de pareil. Était-ce une quelconque coutume de son pays qui la faisait se tenir ainsi ?

- Veuillez excuser Lianelle... Ce n'est que "notre bouffon" royale. Les bonnes manières ne font pas partie de son registre conclut-elle en serrant les mâchoires.

Amylia chercha dans ses souvenirs.... Un bouffon ?... Elle devrait poser la question à son frère.
Sily la regardait avec des yeux ronds. Il avait l'air choqué par la situation. Bah quoi ? que s'était-il passé de si choquant ? Le fait que le Prince l'ait invité à danser était-il si choquant ? Et avec toutes ses interruptions, elle n'avait pas vraiment eu le temps de trouver une réponse appropriée. Que lui avait-il dit déjà ? Ah oui... d'ouvrir le bal en sa compagnie...

Je pourrais lui répondre que ce serait un honneur... Oui cela me parait bien... Je vais lui répondre cela.
Elle se racla la gorge pour attirer son attention et lui donna son plus joli sourire.

Je marche derrière le Prince, s'engouffrant dans les affres d'une mascarade. Rien que les prémisses de ce bal, me rendait fébrile. Et point dans l'excitation. Plutôt agacé. Trop de froufrous, d'indécence, de masques, de non-dit voire de complots. J'aurais préféré pour un moment de félicité dans le calme. Mais ce que dit le Roi, il l'obtient.

Voilà des semaines que tout ce prépare. Fastueux et outrageusement ridicule. Ma foi, je n'avais guère mon mot à dire, à tout ce travail. Caché derrière l'accessoire mis à l'honneur, je reste tout de même sur mes aguets. Suivant le Prince, je me contente d'hochement du chef et de sourire de connivence. Les compliments fusent sur la royale personne que j'accompagne. Valait mieux vu le temps que j'ai subi à réaliser les essayages avec lui !  Quelques flatteries glissent sur moi. Mais je n'ai guère besoin de reconnaissance, juste en terminer avec cet événement.

Je retiens un soupire au bord de mes pulpeuses. Je me tiens droit et fier, donnant le change. Des baises aux hautes dames, de solennels révérences à ces messieurs. Que de théâtralité venant de crasses personnes comptant la fin du royaume. Mais n'en parlons guère en ce soir, il se murmure qu'on doit s'épancher sur les festivités.

Etiquette appliquée à la lettre, pauvre enfant qui voulait passer inaperçu. Je conserve mon sarcasme dans les bas-fonds de mon esprit. Et en fait de même, juste pour l’agacer. J'ai cru comprendre qu'il n'appréciait guère quand j'utilisais les préceptes de la haute avec lui.

Il se faisait encore tôt mais il y avait déjà foules. Je me raidis davantage, prêt à intervenir. Distance par respect pour son rang mais je demeurais l'Ombre prêt à frapper. Légitime défense sera plaidé si je devais trancher des gorges. ^{Allons Mhilo, festif, et non d'orgie sanguinaire.}

Scène surréaliste quand le Prince prend les devants auprès d'une douce demoiselle. Il faut bien l'avouer, arborant une innocente beauté, accompagnée de son frère, tout aussi bien composé. Je me racle la gorge afin de me reprendre. Je reste sans voix, quand Tadriel invite la séduisante ingénue pour l'ouverture du bal.


De celles que j'ai pu croisé et fortement critiqué intérieurement, elle restait une charmante pomme, bien en haut du panier. Sourire en coin qui s'efface rapidement quand la Folle nous offre son spectacl.. Je m’étouffe quand Folie malmène la poitrine d'Innocence. Par barbe inexistante, je reste ... Je détourne le regard aussitôt par respect pour cette généreuse poitrine .. ^{Mhilo, pardi !} Lianelle dans toute sa splendeur. Je soupire longuement, désabusé par son comportement. La mère des manteaux blancs intervient, la charisme opère .. M'enfin on parlait de Lianelle .. Renvoi à la niche, si je peux dire.

Je profite de ce moment pour aller chercher de quoi se rafraîchir, calmer les esprits.. La pauvre donzelle devait être atterrée .. Mais à bien la scruter à mon retour .. Je ne saurais le dire. Je fais une révérence face à la jeune dame et son frère.

^{« Mhilo pour vous servir, je vous prie d’accepter ces verres en guise d’excuse pour ce .. Désagrément »}

Enfin, tout dépend du point de vue. Je tends les verres et distribue les autres aux participants de cette scène surréaliste. La suite des événements promettaient bien des choses si on commençait ainsi. Je me replace non loin du Prince, attendant que cette fameuse danse soit conclue.

Amylia n'avait pas l'air prête à s'évanouir. Tant mieux, parce qu'il se serait senti terriblement idiot si cela avait été le cas. Si elle savait se tenir, alors il en remerciait tous les dieux qui existaient au monde.

Cela ne l'empêchait pas de ne pas savoir quoi faire de ses mains pendant qu'il attendait la réponse de la jeune femme. Mais à côté de celle qui la gêne qui l'envahit quand il entendit la voix incomparable de Lianelle, celle-ci paraissait bien dérisoire.

- Ho non, mon prince, vous avez été plus rapide hé hé hé.

Tadriel lui jeta un regard d'avertissement, pour lui intimer de se tenir tranquille. Mais il n'avait jamais eu la moindre autorité sur la jeune femme - est-ce que quelqu'un était seulement capable de s'en faire obéir, dans ce palais ? - et ni une, ni deux, elle allait derrière la jeune femme pour réhausser sa poitrine.

Et comme si l'affront n'était pas suffisant, voici qu'elle continuait de nouveau. Tadriel n'eut même pas le temps pour ouvrir la bouche que Varda intervenait. Sa voix sèche déchira le silence.

Bon sang, Varda ! Jamais il ne lui avait été aussi reconnaissant d'être si implaccable. Malheureusement, il n'était pas totalement sûr que cela allait dissuader Lianelle de toucher à cette pauvre fille. Parce qu'il la cotoyait depuis ce qui lui semblait être toujours, et il ne l'avait jamais vu reculer, qu'importe les reproches qu'on puisse lui servir.

En tout cas, la pauvre fille ne... semblait pas si choquée que cela. Tadriel, lui, par contre, se demandait ce qui lui était passé par la tête de venir au devant des problèmes. Aucun souci de ce côté-ci, il s'était carrément jeter dedans. Maudite Lianelle, toujours là où on ne l'attendait pas !

Mais quelle torture ! Vivement que le bal se termine !

Mhilo, qui s'était éloigné, revenait avec des verres pour les invités. Ce désagrément. Lianelle en était bel et bien un. Et pas un petit. Elle faisait plutôt partie de ceux qui pouvaient déclencher un véritable incident diplomatique.

Il prit son courage à deux mains et se jeta à l'eau. Pour rajouter au tout, le scandale de Lianelle avait ramoté toute l'attention de la salle sur leur petit groupe.

Encore mieux.

- J'espère que vous offrir cette danse, mademoiselle, sera suffisant pour nous faire pardonner...

Lianelle rigole aux paroles de Varda.

-Hé hé hé, a tes ordres Vardounette. Arrête de froncer les sourcils tu va finir par avoir des rides, c'est dommage tu a un si beau visage hi hi hi.

Puis elle se tourne vers la jeune fille qui semblais ne pas avoir détester se faire tripoter. Lianelle garde cette information bien précieusement dans un coin de sa tête. Elle sourit a la jeune fille (en même temps elle sourit tout le temps et a tout le monde.) et l'embrasse (oui devant tout le monde).

-A plus ma belle. HA HA HA HA.

Puis elle s’éloigne en faisant quelque cabriole forçant plusieurs courtisant a s’écarter au risque de se prendre un coup de pied malheureux. Son roi chéri l'attend et elle sens que ce qu'il a a lui dire sera aussi délicieux que le corps de la petite.

Tout s'enchainait de façon catastrophique.

Amylia n'était pas une sainte ni touche, ni une échevelée à crier et à s'extasier de tout... Enfin elle savait se tenir quand il le fallait et vu le regard de Sily, elle pensait que les choses les dépassaient totalement tous les deux. Certes elle aimait jouer et trouvait tout rigolo mais là elle ne comprenait pas trop ce que tout cela impliquait. L'intervention du général féminin puis le beau gosse en blanc, cela faisait beaucoup. Il était parti très vite le beau gosse -quoi que moins que le Prince, était-ce le prestige ? - mais son regard était très explicite. En fait Sily, le Prince, la générale et le beau gosse étaient choqués donc il y avait des raisons de l'être.
Quand elle y pensait, Amylia se disait qu'effectivement cela n'était pas trop normal de se faire tripoter par une inconnue, même si sa tenue était jolie. Le côté bizarre du personnage - le bouffon, c'était comme cela qu'ils l'avaient appelée - coïncidait avec cette attitude pas normale. Le regard du Prince, avec ses yeux si beaux, était devenu sombre et ce n'était pas ce qu'elle voulait.

Beau gosse revint avec des verres. Elle ne buvait pas d'alcool, avait-il pensé à cela ? Le liquide dans les trois verres étaient identiques donc pouvait-elle espéré que ce soit du sirop ou du jus de fruits au goût exquis. Sa révérence était moins gracieuse, plus guindée que celle du Prince mais il restait élégant quand même. Son regard à ce moment là était si méfiant à regarder tous ceux qui l'entourait les uns après les autres. Faut dire qu'il y avait beaucoup de monde à présent. D'autant que les gens alentours les observaient également. Certains s'était même rapprochés.
Amylia se sentit tout d'un coup complétement perdue. Être le centre de tous ainsi n'était pas ce qu'elle souhaitait. Elle avait l'impression d'être une gamine que l'on va gronder, une pauvrette dont on attend le faux pas. Comme si on lui avait donné la recette pour se sortir de ce genre de situation. Dans les manuels comme dans les leçons de ses précepteurs, personne ne l'avait prévenue qu'à la cour, des bouffons s'en prenaient aux gens. Elle eut l'impression de rougir tant elle avait chaud tout d'un coup.

- J'espère que vous offrir cette danse, mademoiselle, sera suffisant pour nous faire pardonner...
Amylia ne sut pas quoi répondre et resta suspendue aux lèvres du Prince. Elle remarqua alors qu'il n'avait pas les cheveux de paille comme elle l'avait cru tout d'abord mais ils étaient bel et bien blanc comme neige. Ce devait être la lumière qui lui avait donné cette impression. Devait-elle s'excuser de cette méprise ? On lui avait parlé de cette histoire de cheveux blanc mais elle se rendait compte qu'elle n'avait jamais écouté ce qu'on lui avait dit. Et là, ils avaient presque tous les cheveux blancs. Qu'est-ce que cela voulait dire ?

Le bouffon s'interposa entre elle et le Prince qui attendait sa réponse et lui sourit. Et sans qu'Amylia puisse le voir venir, l'embrassa. Amylia se figea devant cet événement encore plus inattendu que tout ce qui s'était passé auparavant. Loin d'être agréable, elle se sentit toute petite, une misérable petite fourmi qu'on venait d'écraser.

-A plus ma belle. HA HA HA HA.
Un frisson la parcourut. La bouche ouverte, Amylia reporta son attention sur le Prince. Elle posa sa main sur ses lèvres et roula des yeux pour observer tout le monde. Mais elle ne vit rien, tout était devenu flou. Cela voulait dire qu'elle allait revenir ? Non... Pas ça ! Je ne veux pas ! Laissez-moi tranquille. Je veux rentrer chez moi. Elle regarda Sily qui ne lui apporta aucune aide. Il n'était jamais là quand on avait besoin de lui, celui-là. Tu parles d'un grand frère ! Elle prit le verre qu'on lui avait tendu et l'engloutit sans se poser de questions. Puis elle prit celui du Prince et l'ingurgita aussi vite que le premier. Elle se rendit alors compte que le Prince avait l'air navré. Alors s'accrochant à son regard, le seul qui avait l'air de pouvoir la sortir de cette situation et avec un petit hochement de tête désespéré, elle accepta la danse en avalant sa salive.

Si vous voulez un peu de musique en lisant:

Lianelle eut un rire qui donna la chair de poule à Tadriel. Il connaissait la jeune femme depuis des années maintenant et malgré tout, elle l'impressionnait toujours. Il ne comprenait pas pourquoi son père la gardait auprès de lui. Ou peut-être était-ce justement le but recherché...

Oui, à bien y penser, il devait y avoir de cela ! Son père cherchait à choquer les esprits.

Quant au Vardounette... Il n'y avait bien qu'elle pour appeler la Commandante des Manteaux Blancs de cette manière ! Au moins eut-elle la bonne idée de disparaître en cabriolant juste après avoir ... embrassé la jeune femme.

Comme si soulever sa poitrine n'était pas déjà suffisant !

Tadriel n'avait jamais été aussi... affligé. La pauvre fille ne semblait plus savoir où donner de la tête, quant à son frère, cela ne semblait pas tellement mieux. Lianelle avait le don de dérouter tout le monde. Même les hommes les plus terre-à-terre.

Il ne s'était cependant pas attendu à se faire ainsi voler son verre par la jeune femme, qui l'engloutit aussi sec qu'elle n'avait bu le sien. Il se racla la gorge, mal à l'aise, et attendit sa réponse. Bon sang, mais tous ces regards n'auraient-ils pas pu regarder ailleurs ?

- Je m'excuse pour ... tout.

Il ne voyait guère que dire d'autre. Toujours était-il qu'elle acceptait la danse et que vu ce qu'il avait attiré sur elle - quoique ... Lianelle l'aurait repérée de toute manière - il la lui devait bien. Il lui tendit la main avec élégance, en s'inclinant.

Quand elle y posa la sienne, il l'entraîna vers la piste de danse. Puis, il se mit face à elle, avec un petit sourire désolé. Il fit un petit signe de tête aux musiciens qui se tenaient prêts pour leur dire de commencer.

Il s'écoula une micro-seconde puis la musique débuta, et le bal avec elle. Tadriel sourit une nouvelle fois à sa cavalière, pour l'encourager - il n'aimait pas être le centre de l'attention mais il savait malgré tout en faire abstraction quand il le fallait - et il l'entraîna avec lui.

Il demanda à mi-voix, pour tâcher de la faire penser à autre chose. Le comportement de Lianelle l'avait sincèrement rendu compatissant...

- Je ne vous ai pas demandé... Comment vous appelez-vous ?

Amylia posa ma main dans la sienne et le suivit vers le centre de la salle. C'était très impressionnant. Toutes les personnes présentes s'étaient arrêtées et les regardaient en faisant des petits commentaires plus ou moins discrets à leur voisin. Tous étaient même figés pour l'occasion. Elle en vit certains rirent, des jeunes filles gloussaient en se tortillant, des dames avaient l'air outré, des hommes souriaient avec un regard qui le lui disait rien qui vaille. Amylia se demandait bien ce qui pouvait être dit. Avait-elle la bonne allure ? N'était-elle pas rouge après toutes ces péripéties ? Sa robe n'était-elle pas froissée ? La regardaient-ils à cause des événements qui venaient d'avoir lieu ou parce qu'elle tenait la main chaude du Prince et se préparait à être dans ses bras ? Peut-être même se demandait-on si elle savait danser ? Savait-elle danser ? Danserait-elle comme il le fallait ? Avec un Prince tout de même, ce n'était pas rien. Elle avait appris à danser certes, elle se débrouillait en la matière certes, mais là il s'agissait DU Prince....

Elle se concentra sur sa main chaude pour ne pas fuir en courant. Danser devant tout le monde, c'était impressionnant quand même. Elle marchait légèrement derrière lui et observa sa nuque et son dos. Il avait fière allure quand même. Quelle chance elle avait...

Quand il s'arrêta au centre de la piste, Amylia n'avait plus aucune conscience des alentours. Et le sourire qu'il lui fit quand il se retourna vers elle lui chavira le cœur....

Je suis totalement amoureuse.

Les musiciens commencèrent à jouer... Le Prince la prit dans ses bras avec un sourire rayonnant. Il avait l'air tellement sûr de lui. Danser devant tout le monde ne semblait lui faire ni chaud ni froid. Pour sa part, Amylia se sentait tremblante des pieds à la tête. Tremblante de danser devant tout le monde ou tremblante de danser avec LE Prince. Tremblante d'être amoureuse peut-être.
Avant de commencer à danser, il lui murmura d'une voix qui la troubla :

- Je ne vous ai pas demandé... Comment vous appelez-vous ?
Amylia se redressa et le regarda dans les yeux. Il était juste un petit peu plus grand qu'elle. Il avait des yeux d'un bleu si clair qu'elle resta interdite quelques secondes à le contempler. Puis réagissant elle répondit dans un sursaut qu'elle espérait ne pas trop être visible :

- Amylia Emerrsta, marquise héritière du domaine d'Emerrsta, au sud de Lioffel, enchantée de vous rencontrer, MON Prince. C'est un SI grand honneur...

Puis elle ne put s'empêcher de compléter :

- C'est comme cela qu'il faut parler, hein, n'est-ce pas ? En tout cas, c'est la formule que mon frère m'a dit de vous dire. Moi pour ma part, je vous aurais dit un truc plus simple.

Après un léger instant, ils commencèrent à danser. Amylia s'appliquait pour être sûre de ne pas faire de faux pas. Elle avait peur de lui monter sur les pieds, si les enchainements étaient différents de ce qu'elle connaissait dans sa province profonde. Elle allait enfin pouvoir voir si ses précepteurs étaient des personnes compétentes ou de farfelus imposteurs. Comme rien n'était trop compliquée dans la proposition du Prince, elle sourit et ils accélérèrent. Ils se mirent à tournoyer autour de la salle tels des oiseaux virevoltant dans une parade amoureuse. Amylia en était toute étourdie. Alcool, valse, chaleur, Prince, tout cela était trop....

Bientôt le Prince ralentit la danse et Amylia se rendit compte qu'ils n'étaient plus seuls sur la piste. Ouf ! Elle lui sourit et s'enquit de son opinion :

- C'était éprouvant tous ces regards posés sur nous. Comment faites-vous pour supporter le supporter en permanence ? C'est d'un perturbant.

L'attitude de la jeune femme dans ses bras le surprit, d'autant quand il la sentit sursauter avant de lui répondre, comme si elle se réveillait... Il eut un demi-sourire et répondit :

- Je suis enchanté de vous rencontrer, mademoiselle Emerrsta. C'est un honneur pour moi aussi.

Mais il avait à peine refermé la bouche que...

- C'est comme cela qu'il faut parler, hein, n'est-ce pas ? En tout cas, c'est la formule que mon frère m'a dit de vous dire. Moi pour ma part, je vous aurais dit un truc plus simple.

Sous le coup de la surprise, Tadriel la regarda durant une seconde, puis il rit. Eh bien ! Elle était bien spontanée, cette demoiselle-là ! Mais comme les regards restaient posés sur eux, il ne répondit tout d'abord pas. Il s'agissait d'ouvrir ce bal en premier lieu... et de ne pas faire d'erreur. Après tout, il était le Prince.

Et le Prince n'avait pas le droit de faire un faux pas, encore moins durant un bal comme celui-ci.

Il ne fut jamais autant soulager que lorsqu'enfin, les autres couples prirent la relève de cette valse en les rejoignant sur la piste. Les regards cessèrent de peser sur eux. Le bal était officiellement ouvert !

Il se permit de ralentir la cadence, pour se reposer un peu. Nul besoin d'être époustouflant quand personne ne vous regardait et autant lier la conversation avec celle qui se trouvait dans ses bras à l'heure actuelle. Il fallait dire que sa dernière remarque l'avait intrigué et il était bien curieux d'en apprendre un peu plus sur ce qu'elle aurait aimé lui dire si l'étiquette le lui avait permis...

- Et donc ? Qu'est-ce que vous m'auriez dit, si votre frère ne vous avez pas enseigné cette formule ?

Puis, il eut un hochement de tête pensif, tandis qu'il répondait à sa question :

- C'est le rôle d'un Prince, vous savez. Je n'aime pas vraiment cela non plus, mais on finit par s'y habituer. Une simple question d'habitude, c'est tout.

Vardounette. Var-dou-nette. Var-dou-nette. La Commandante des Manteaux Blancs fusilla la Folle du regard sans dire le moindre mot.
Une colère sourde grondait, faisant écho à ce pitoyable surnom. Stupide. Ridicule. Effarant.
Lianelle se faufila à coup de roue dans la masse humaine tandis que la dragonne ne pensait qu’au jour où elle aurait l'immense honneur de lui rendre la monnaie de sa pièce. Si seulement Tadriel, le lui ordonnait…
Elle reposa son attention sur son protégé et inclina doucement la tête. Elle pouvait le sentir aussi mal à l'aise que soulagé. Mhilo se montra comme toujours extrêmement prévenant. Elle prit son verre -d'eau- et le remercia d'un discret signe. Il n'avait au moins pas oublié qu'elle ne buvait jamais durant son service. L'alcool diminuait l'attention et les réflexes. Ce n’était pas dans le code mais boire et veiller n’était nullement compatible, selon elle. Ce soir, plus que jamais, elle avait besoin de ses pleines capacités.

Le jeune Prince invita la jeune fille à ouvrir le bal pour se faire pardonner de cette mésaventure. Une gageure quand on connaissait son amour de la représentation. Mais il allait devoir s’y faire, s'il souhaiter, un jour, monter sur le trône. Elle l’encouragea intérieurement, préférant de loin sa place que la sienne.
Danser. Au milieu d'une foule qui n’avait d'yeux que pour vous. Mon pauvre Tadriel, personne ne peux prendre ta place ce soir. Pas même Mhilo.

Pourtant, elle reconnaissait que ce bal était l'occasion rêvée de trouver celle qui serait peut-être leur futur Reine. Varda scruta le public. Tous s’était alignés, le plus près des murs afin de laisser autant de place que possible à son Altesse. Elle balayer le cordon humain : tous les Manteaux Blancs étaient présent, à intervalles réguliers, près à intervenir à la moindre incartade.  Rassurée par la sécurité, elle se prit observer les jeunes filles présentes tout en gardant un œil vigilant.
Pas trop écervelée. Celle-ci est bien mignonne mais vraiment… on ira pas bien loin avec… songea-t-elle en regardant le couple danser.


Trop vieille.
Trop jeune.
Trop maigrelette.
Trop instable.
Trop rêveuse
Trop présomptueuse
Trop séductrice…

Elle passa ainsi en revue les poupées dans leurs robes bouffantes et autres fanfreluches colorées. Alors que le Prince poursuivait sa danse, la Commandante posa sa main sur Gardevie. Tadriel l'autoriserait-il à vérifier la qualité de sa dame à l’épée ? Mhilo s'en offusquerait sans doute mais la Commandante ne voulait pas d'une futur Reine béni-oui-oui qui brodait des petites colombes et vidait les caisses du Trésor en aumône. Qui plus est si Varda devait un jour se retrouver à son service. Non. Tadriel méritait mieux et elle aussi.
Le bal était ouvert officiellement, d’autres danseurs se joignirent au couple, visiblement soulagé.

Mon cher Tadriel… Si seulement tu pouvais maitriser aussi bien tes chorégraphies d’escrime que tes pas de danse alors Mhilo pourrait enfin te lâcher un peu la grappe songea Varda un brin amusée intérieurement.

- Et donc ? Qu'est-ce que vous m'auriez dit, si votre frère ne vous avez pas enseigné cette formule ?

Amylia eut un temps de réflexion. Elle avait encore parlé avant de tourner sa langue dans sa bouche. Et elle se retrouvait à devoir dire un truc qu'elle avait avancé sans même y penser. Quelle cruche ! Quelle idiote elle faisait.

Voyons réfléchissons vite et bien ! Amylia Emerrsta, marquise héritière du domaine de truc, au sud de machin, enchantée de vous rencontrer, MON Prince. C'est un SI grand honneur... C'est pompeux, c'est présomptueux, c'est rasoir. Qu'est-ce qu'Amylia, l'intrépide Amylia aurait répondu à ça ? Non ça ne se fait pas! Qu'est-ce Amylia, l'amie des oiseaux aurait répondu ? Cuicui ! Quelle idiote je fais ! Je suis un peu cruche quand même !

Elle essaya de ne pas rire de sa bêtise et se concentra sur la question.

- Je me serais présentée simplement. Amylia Emerrsta, voilà c'est tout. Je ne vous connais pas assez pour faire un trait d'humour qui pourrait tomber à plat, ni pour vous en dire plus. Et Je n'ai pas l'intention de vous faire des courbettes. Je trouve cela tellement agaçant tous ces prétendants qui essayent d'être agréables pour obtenir mes faveurs alors je ne vais pas vous faire cela. En plus, j'ai pu remarqué toutes ces filles qui gloussent dès qu'elles vous voient. Elles sont pas un peu cruches quand même.

Puis se rendant compte qu'elle venait elle-même de se traiter de cruche, elle s'inquiéta :
- Rassurez-moi, je ne fais pas ça moi ?

Elle sourit quand il répondit à sa question :
- C'est le rôle d'un Prince, vous savez. Je n'aime pas vraiment cela non plus, mais on finit par s'y habituer. Une simple question d'habitude, c'est tout.

Il était à la fois résigné et digne. Un vrai Prince. Tout comme elle pouvait imaginer un prince tout ce qu'il y avait de plus princier. Et comme tout prince, il devait jamais rester seul très longtemps. Des milliers de questions fusèrent dans sa tête. Était-il toujours accompagné ? Comment se passait ses journées ? Pouvait-il marcher tout seul dans le jardin ? Avait-il des amis ? Avait-il le droit d'aller où bon lui semblait ? Dormait-il seul ? Allait-il aux toilettes tout seul ? Grandes questions qu'elle ne pouvait quand même pas poser. Dommage !

- J'ai remarqué que vous étiez toujours accompagné par... Beau gosse, comment le dire autrement ? heu... un garde du corps. Je sais bien qu'en tant que Prince, le royaume se doit d'assurer votre sécurité mais cela doit être chiant de ne jamais être seul. Moi quand Sily est derrière moi, je n'ai qu'une envie, c'est de partir en courant, de me cacher pour pouvoir vivre ma vie comme je l'entend.

Maintenant qu'il n'était plus seulement concentré sur ses pas pour ne pas se mélanger les pinceaux, il remarquait que la jeune femme - Amylia Emerrta, donc - dansait plutôt bien elle aussi. Quant à ce qui sortait de sa bouche, c'était... rafraîchissant. Elle parvenait presque à changer la corvée que représentait cette ouverture de bal en quelque chose d'agréable. Et il devait reconnaître que c'était tout à son honneur.

Elle avait un petit côté différent de celui des autres jeunes femmes. Quelque chose qui envoyait valser - et c'était le cas de le dire, puisqu'ils valsaient eux-même ! - l'étiquette à la poubelle. Cela n'était pas pour lui déplaire. Il l'écouta, sans rien répondre, parler des autres prétendantes. Oh oui, elles gloussaient effectivement. Et il avait horreur de cela.

Quand elle s'inquiéta de son comportement, il eut un petit éclat de rire, parce qu'il ne s'était pas attendu à cette question-là. Sans cesser de tourner en même temps que les autres couples sur la piste de danse, il répondit :

- Rassurez-vous, mademoiselle. Vous ne gloussez pas comme elles.

Il ne dit rien de plus, parce que si cette jeune femme était rafraîchissante, il n'en demeurait pas moins contraint de respecter l'étiquette devant les nobles de cette cour. De toute manière, elle se chargeait pour eux deux de faire la conversation et cela le faisait sourire. Surtout que les nobles qui lui parlaient faisaient tous attention à leur vocabulaire. En soi, autant dire que chiant n'était pas un mot qu'il entendait souvent.

- Oui, parfois, c'est chiant d'être Prince, reconnut-il alors en lui faisant un clin-d'oeil complice lorsqu'il reprit ses mots.

Il fit une nouvelle pause et reprit ensuite :

- Sily ? C'est l'homme qui vous accompagne ? C'est donc votre frère ?

Pourtant, il demeurait une différence majeure entre eux, qui plongea Tadriel dans une certaine mélancolie. Amylia n'était qu'une noble. Elle restait tenue par l'étiquette et la bienséance, comme tous, mais elle demeurait relativement libre.

Tadriel, quant à lui, restait le Prince. De surcroît, le Prince héritier. Celui qui serait à la tête du royaume, peut-être un jour pas si lointain que cela, et qui porterait la vie de chaque citoyen sur la conscience. Il ne pouvait pas faire ce qu'il voulait. Les responsabilités pesaient au-dessus de ses épaules bien plus qu'au-dessus de celles de sa cavalière.

Il ne pouvait pas se permettre de tout envoyer valser, lui, même s'il en mourrait souvent d'envie. Puis, il repensa à Lianelle, à son passage éclair, et il ressentit de nouveau le besoin de s'excuser.

- Je tiens sincérement à vous demander pardon pour le comportement de Lianelle. Elle est... un peu spéciale. Je suis navré qu'elle ait jeté son dévolu sur vous ce soir. Si je peux vous donner un conseil, évitez de rester seule ce soir.

Rassurez-vous, mademoiselle. Vous ne gloussez pas comme elles.

Amylia sourit heureuse de ne pas glousser. Elle n'aurait pas aimé être comparée à ces jeunes filles qui s'enthousiasmaient sur son passage. Elle s'enthousiasmait de tout certes mais de là à glousser, il y avait un monde. Les filles en question avaient l'air niais. Elle ne voulait pas avoir l'air niais. Un peu fantasque peut-être mais pas de niaiserie. De la naïveté comme on disait chez elle, mais pas de niaiserie. Elle aurait horreur qu'on lui trouve de la niaiserie.

- Oui, parfois, c'est chiant d'être Prince

Il était charmant de le lui dire comme cela. Il était charmant de lui faire un clin d'oeil complice. Elle se sentit sur un petit nuage. Le Prince lui avait fait un clin d’œil et ne la prenait pas pour une demeurée. Il lui souriait, lui faisait des clins d’œil – un mais c'était déjà ça ! – et participait à ses frasques. Elle n'était donc pas si idiote... Le Prince restait convenable mais elle sentait qu'il ne lui tenait pas rigueur de ses libertés de langage. Elle se demanda s'il faisait facilement des écarts, comme elle, comme leur âge le leur permettait encore, ou s'il se forçait seulement pour lui être agréable. Elle avait peut-être un peu trop lâcher sa garde et laisser ses mots sortir de façon trop libre. Elle était capable de se tenir quand cela était nécessaire. Aussi décida-t-elle de se tenir quelques minutes pour ne pas le froisser. Et discrètement de vérifier si elle pouvait être libre comme elle avait envie de l'être.

- Sily ? C'est l'homme qui vous accompagne ? C'est donc votre frère ?

- Sily est mon frère bien-sûr. Il est plus âgé que moi de dix ans et est très, voire trop sérieux à mon goût. Mais j'imagine que sa prestance et son parler distingué lui ouvrent beaucoup de portes et l'intérêt de ses comparses. Je pourrais parler ainsi c'est sûr, je sais le faire et je le fais quand c'est nécessaire et, j'avoue, quand je n'ai pas d'autres choix, mais avouez que c'est un peu lassant de toujours faire attention à ce que l'on dit, à ce que l'on fait. Aussi, je vous présente mes excuses si je vous ai heurté avec mes mots familiers au milieu du protocole. J'aurais dû m'incliner et vous fournir les fadaises qu'il convient à votre rang et non pas me laisser aller à être moi-même en considérant que ce petit interlude dansé serait un temps à part à savourer dans l'euphorie de l'instant. Heu... Un peu comme si nous étions, ou avions été des amis, à qui on peut dire simplement les choses sans avoir peur d'enfreindre la bienséance... Avez-vous des instants comme cela ? Par ce que je pense, en ayant observer mon père et mon frère, avec leur façon de procéder totalement différente face à leurs responsabilités, qu'il est possible de.... mais je parle, je parle, je dois vous ennuyer...

Amylia fixa l'épaule de son cavalier, celle qui était juste devant elle, avec les ornements qui y brillaient. Elle devait être ridicule. Elle s'étalait, elle s'étalait. Elle parlait et il écoutait. On lui disait toujours qu'elle était trop bavarde et cela se confirmait. Elle devrait profiter du moment de danser avec LE PRINCE, ce privilège extraordinaire et fermer sa grande bouche qui débitait des âneries plus grosses que les ânes qu'elle connaissait.

- Je tiens sincérement à vous demander pardon pour le comportement de Lianelle. Elle est... un peu spéciale. Je suis navré qu'elle ait jeté son dévolu sur vous ce soir. Si je peux vous donner un conseil, évitez de rester seule ce soir.

Ah ! Oui, cette aventure ! Amylia lui donna un sourire crispé.

- Vous croyez vraiment qu'elle va revenir ?

Cette fille était un petit moulin à paroles. Tout en dansant, elle l'abreuvait de milles paroles, et c'était à peine si elle pensait à reprendre sa respiration. A peine si elle lui laissait le temps de répondre aussi.

Donc, ce jeune homme là, propre sur lui, était effectivement son frère. A vrai dire, il y avait un petit air de ressemblance entre les deux, quand on les regardait mieux... Même si, visiblement, leurs caractères étaient très différents.

- Mais j'imagine que sa prestance et son parler distingué lui ouvrent beaucoup de portes et l'intérêt de ses comparses.

Tadriel hocha la tête. La cour de son père n'était faite que de cela. L'apparence pour attirer l'oeil des autres - qui ne manquaient jamais, à un moment ou un autre, de finir par vous cracher dessus toute leur haine. Mais Amylia continuait, et il n'eut pas le temps de lui faire la moindre remarque à ce sujet.

Il ne s'attendait pas à ce qu'elle lui présente ses excuses pour son comportement. Au contraire, cela l'amusait plutôt ! Un peu de légéreté dans son quotidien. Un petit rayon de soleil au milieu de cette nuit qui se promettait bien noire. Hier soir, le coucher du soleil avait fait rougeoyait le ciel. Selon les croyances, on disait que cela annonçait beaucoup de sang. Étrangement, il n'en doutait pas.

Quoi que dise les présages, réalité ou non, cette nuit ne serait pas si paisible que cela... Il finit par prendre la parole :

- Je vous suis reconnaissant de ne pas m'avoir servi ces fadaises, dans ce cas...

Oui, décidément, cette jeune femme était drôle. Et puis d'un coup :

- Mais je parle, je parle, je dois vous ennuyer...

Tadriel eut un léger froncement de sourcils et il secoua la tête :

- Non, non, allez-y. Clarifiez votre pensée. Ca m'intéresse, ce que vous alliez dire.

Malheureusement, il ne pouvait pas lui mentir, concernant Lianelle. Elle ne faisait pas vraiment parti des personnes que l'on pouvait dissuader. Il lui rendit un sourire désolé, et choisit avec soin ses mots pour tâcher de l'inquiéter plus qu'elle ne l'était déjà :

- Eh bien ... si vous restez accompagnée et que vous ne restez pas seule, il ne devrait pas y avoir trop de problèmes.

Quoique...

La foule n'arrêtait pas Lianelle.

Jamais.

Et sûrement encore moins ce soir.

- Je vous suis reconnaissant de ne pas m'avoir servi ces fadaises, dans ce cas...      
Amylia rougit sans savoir vraiment pourquoi et continua sur sa lancée. Il valait mieux parler et débiter des âneries que de faire trop attention à sa situation... dans les bras du Prince... pour la première danse... en train de parler avec lui... avec ses sourires et ses yeux intenses... elle ne voulait surtout pas paraître comme ces jeunes filles avec leur air de.... beurk ! Parler était la solution. Parfois, elle avait l'impression qu'il n'écoutait que d'une oreille mais tant pis, elle avait l'habitude qu'on écoute pas toujours ses inepties. On lui disait souvent qu'elle vivait sur une autre planète et bien, ils étaient idiots tout ceux qui comme Sily avait les pieds sur terre.... car son territoire imaginaire était bien plus beau, na !

- Non, non, allez-y. Clarifiez votre pensée. Ca m'intéresse, ce que vous alliez dire.      
- Et bien, face aux responsabilités, mon frère est toujours très proche de l'étiquette, il ne déroge jamais à rien. Très sérieux, je trouve qu'il est de plus en plus aigri et il se fane peu à peu. Je pense que quand il sera vieux, il sera un grincheux exigent et jamais satisfait.

Elle rit légèrement puis redevint sérieuse de peur de ressembler aux autres filles.

- Mon père lui était un homme exceptionnel. Communément, on disait de lui qu'il était très à cheval sur les protocoles dans sa vie publique. Mais quand il était avec moi... il laissait tout cela pour simplement s'amuser.

Elle se doutait qu'elle allait paraître un peu folle mais elle continua avec un sourire, le regard rêveur.

- Il m'a appris à voir les événements de la vie avec philosophie et à garder une vie intérieure riche et secrète pour ne pas désespérer face à tout ce que la mondanité exige de nous. Nous la partagions, ma vie secrète et il me la nourrissait. Si j'ai de l'imagination, mon père en avait encore plus. Vous savez ce que c'est que de partager ou votre rang vous en empêche ?

Il lui conseilla de ne pas rester seule. Amylia avala sa salive. Elle se sentit défaillir. Non pas cela ! Elle imaginait sa soirée au bras de Sily... Oh désastre ! Ce n'était pas possible.

- C'est que... comment vous dire.... je ne tiens pas à rester accompagnée toute la soirée... car j'imagine que vous pensez à mon frère. Il est impossible que je reste toute la soirée avec lui. Il est tellement... comment dire... d'un rasoir... si vous me permettez de m'exprimer ainsi. Je pensais profiter de la soirée pour faire deux ou trois choses dont je rêve depuis toute jeune.

Tadriel l'écouta sans la couper, une fois de plus. Cette fille était un véritable moulin à paroles, à croire qu'elle avait toujours quelque chose à dire et que les mots se pressaient sur sa bouche pour sortir le plus vite possible. Non pas que ce soit désagréable, cela dit, bien au contraire. Ce n'était pas un discours totalement dénué d'intérêt ou de sens, comme les autres demoiselles. Pour la clarté, il devait parfois se concentrer, mais bon. C'était ce qui lui donnait son charme, au fond.

D'ailleurs, son rire était plutôt communicatif. Pourtant, elle se reprit bien vite pour évoquer son père. Ce qui, immanquablement, le fit penser au sien.

Ah là là...

Son père. Le Roi. Un sujet épineux, assurément.

Pour ainsi dire, Tadriel ne connaissait pas les relations que décrivaient la jeune femme avec son géniteur. Lioffel XX n'était pas exactement le même genre d'homme et le prince ne pouvait pas se targuer de savoir ce que c'était, d'avoir un père aimant. S'il le fut quelque peu à une époque, ce temps-là était entièrement révolu.

Quant à l'imagination... Oh oui, pas de doute : le Roi en avait à revendre. Mais une imagination sombre, provocante, effrayante. Au-delà de cela, carrément tordue et malsaine. Certainement pas la même sorte dont disposait la jeune Amylia... qui ne devait pas être tellement plus jeune que lui a bien y penser.

- Vous savez ce que c'est que de partager ou votre rang vous en empêche ?

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C'était une notion bien abstraite, plutôt subjective et il réfléchit avec grande attention à sa question, pour lui répondre le plus sincèrement possible :

- Eh bien, je dois avouer, pas souvent mais...

Il repensa à la soirée qu'il avait passée à la taverne, quelques jours plus tôt, avec les Manteaux Blancs. Il devait le dire, il avait partagé des choses à ce moment-là.

- ... cela m'arrive parfois.

Il ne put en dire plus - de toute manière, il n'allait certainement pas lui expliquer ce qui c'était passé à la taverne, ce soir-là - et dans tous les cas, le sujet revenait sur Lianelle. Amylia ne semblait pas exactement ravie de devoir rester toute la soirée avec son frère.

- Pourquoi vous n'essayeriez pas de partager des choses avec votre frère aussi ? Peut-être qu'il n'est pas si rasoir que cela ?

Il fit une pause, lui sourit et reprit aussitôt :

- Mais soit. Si je vous trouve un cavalier pour la soirée - quelqu'un qui ne soit pas trop rasoir, comme vous dites - est-ce que vous accepteriez de rester en sa compagnie ?

Honnêtement, c'était cela ou recroiser Lianelle. A ses yeux, le choix était vite fait.

Comme la musique se taisait enfin, Tadriel s'arrêta, lui sourit encore.

- De quoi rêvez-vous donc ? s'enquit-il en la prenant par la main pour la ramener hors de la piste de danse.

Arrivé, il s'inclina pour un baise-main, et conclut l'entrevue par un :

- Vous avez quelques questions supplémentaires à me poser avant que je ne vous laisse ?