Wald put enfin prendre une courte pause certes, mais tout de même un petit moment pour lui où il pouvait fuir l'ambiance d'oppression maximale dégageant des cuisines. Le bruit infernal de l'agitation et du stress l'épuisant vraiment. Il fallait bien évidemment nourrir tout ce beau monde, composé pour la majorité de nobles ou bien de riches entrepreneurs. Ce bal était un très grand événement et aucun cuisinier ne pouvait se permettre de traîner du pieds à ne rien faire.
De plus et comme pour lui rajouter une difficulté, le jeune homme eu plus de retour de plats et verres de champagnes vides de ce qui était pensé et a dû redoubler d'efforts et surtout de préparations de petits fours sucrés ainsi que de vaisselles pour rattraper cette imprévue.

Mais bon maintenant, il était collé à un mur regardant les invités s'amusés et déguster ces petites créations avec plaisir. Il ressentait comme une certaine fierté d'avoir réussi à préparer des minis-gâteaux qui avaient l'air de plaire à une grande partie de la foule.

Tout ces efforts ne sont pas faient pour rien

Se disait-il pour relativiser un peu sur "sa punition".
Cependant, il ne comprenait toujours ce qu'on lui avait reproché réellement, il n'avait que permis à une jeune orpheline et ses deux petites soeurs de se nourrir. Au contraire, il pensait qu'il avait bien fait, il ne se voyait pas laisser mourir de faim de pauvres gamines. Au final, il se fichait de se retrouver en tant que cuisinier royale, le pire c'était qu'il ne pouvait plus venir en aide à ces enfants.
Et voir tous ces nobles s'amuser dans le luxe, pendant que d'autres faisaient tous pour essayer de survire face à la faim et au froid dans les bas-fonds de la capital, l'irritait parfois. Il avait appris que la société était simplement et souvent injuste, il détestait l'avouer mais pourtant c'était bien la pure vérité.

Wald balada ses yeux dans la foule de bourgeois, et y aperçu dans ce beau tableau illuminée par la somptuosité comme une petite tâche noir. Un invité portant un habit moins élégant et surtout se recroquevillant dans son coin pour...

Manger la totalité des petites fours !

Il avait enfin trouvé la cause principale de ces plats et peut-être verres vides !
Pourtant sans aucun brin de colère, il s'avança vers celui-ci. A sa rencontre, il finit par dire avec un sourire taquin :

- Que vois je ? Le criminel des plats vides effrayant la majorité des cuisiniers du palais.

Il prit une de ces tartelettes à la framboise et reprit :

- J'espère qu'au moins, vous réussissez à appréciez les délices proposées au buffet.

Nathanael mangeait. Encore. Mais il fallait dire qu'après la valse partagée avec Cerise, il avait terriblement besoin de se remettre de ses émotions. Il avait pris une sorte de petit amuse-bouche, sans savoir ce que c'était, et il avait trouvé cela terriblement bon mais avec un goût de trop peu qui l'avait poussé à en reprendre.

Un, deux, trois. Cinq. Il en était au dixième quand une voix masculine, soudain, attira son attention :

- Que vois-je ? Le criminel des plats vides effrayant la majorité des cuisiniers du palais.

Nathanael sursauta et se retourna vers la voix. Un homme progressait vers lui - c'était donc bien à lui qu'il s'adressait, et puis, ce n'était pas la première fois qu'on le comparait à un criminel dans la soirée ... - mais il ne semblait pas en colère. Juste taquin et amusé.

Les cuisiniers du palais. Il aurait aimé pouvoir les rencontrer, juste par curiosité. Cette idée avait germé dans son esprit pendant la danse avec Cerise et il n'arrivait plus à s'en défaire. Il en avait terriblement envie... Savoir qui cuisinait avec autant de talent des choses aussi bonnes. Est-ce qu'il les effrayait vraiment ? Il ne faisait pas de mal, pourtant ... et en plus, il n'était pas tout seul à manger à ce buffet ! Certes, il n'avait jamais autant mangé de sa vie mais ... tout de même.

Il regarda l'homme prendre une tartelette à la framboise, avec un air prudent, mais comme ce dernier ne semblait définitivement pas en colère contre lui, il se détendit. Il reprit un onzième petit four. Dans le petit plat rond, il n'en restait qu'un seul.

- B'soir, M'sieur.

Il baissa les yeux sur le petit four restant, releva les yeux vers l'homme, et fit deux allers-retours ainsi avant de finalement demandé, un peu gêné, en attrapant le petit four avec les doigts - couverts oubliés - et en lui tendant :

- Vous v'lez l'dernier ?

Il remarqua alors l'étrange vêtement blanc qu'il portait par dessus et ...

- C'pour pas vou'salir en mangeant, dites ? demanda-t-il ensuite.

Lors de son arrivé, "le criminel" ne chercha même pas à se justifier ou bien se défendre, et préféra continuer à commettre son crime envers les petits-fours. Il n'avait pas besoin de réponse à sa demande pour savoir qu'il appréciait ce qu'il y avait de proposer au buffet. Il avait l'air de se régaler, et ce détail alimenta cette sorte de fierté chez Wald pour son travail aux cuisines. Il est vrai qu'au début, il ne pensait arriver à supporter longtemps l'agitation et le bruit infernal de ce milieu mais la satisfaction d'avoir put régaler les papilles des autres grâce à ses plats avait commencer à équilibrer la balance.

Puis, l'homme prit le dernier petit-four pour lui présenta en lui demandant si il le voulait, il lui sourit et fit un signe de tête :

- Je vous en prie, prenez-le.

Ensuite, quand l'homme porta son intention sur sa tenue, Wald baissa les yeux vers son tablier qu'il avait oublié de quitter avant de s'avancer vers les convives. Cet oubli devait légèrement attirer l'intention des nobles lioffelois se demandant sûrement ce qu'un cuisiner normalement se trouvant dans les cuisines faisait dans les parages. Mais apparemment, son habit blanc n'avait pas le même effet pour tout le monde, comme par exemple son interlocuteur qui a la place lui demanda si elle avait une autre utilité. Le jeune homme retint de lâcher un rire, et dit plutôt :

- En effet, ce tablier permet de ne pas me salir mais tout de fois, je doute énormément qu'un cuisinier puisse profiter à sa guise de ses propres plats surtout quand ceux-ci vous sont destinés.

Puis par curiosité, il ajouta :

- D'où venez vous ? Monsieur....

Il continua sa phrase en attendant qu'elle soit complété par l'intéressé.
En effet, cet homme portait un habit et un masque plutôt simple pour un bal, son "accent campagnard" se faisait bien entendre et il n'avait l'air être très à cheval sur les règles de noblesse...Bref, il n'avait rien d'un noble.

L'homme laissa le dernier four à Nathanael avec un sourire et le jeune homme ne se fit pas prier pour l'engloutir. C'était vraiment délicieux ! Il se lécha les doigts pour ne pas en perdre la moindre miette.

La réponse à propos de l'étrange vêtement blanc ne fut pas longue à venir. Il n'avait jamais vu personne en porter, sauf le petit commis du boulanger qui venait vendre les pains de son chef le matin sur le marché et qui lui jetait parfois une miche discrètement. De ces gestes, Nathanael lui était reconnaissant, parce qu'il savait bien que si on le voyait, il pouvait perdre son emploi. Ou du moins, recevoir une correction.

Alors pourquoi, si c'étaient les boulangers qui en avaient, les nobles de ce château pouvaient en porter aussi ? La seconde partie de la phrase, cependant, le ramena au présent et lui fournit une réponse. Il ouvrit de grands yeux. Un cuisinier ? Un cuisinier du palais ? Un de ceux qui préparaient tous ces bons plats ?

Il faillit en lâcher le toast qu'il avait attrapé - parce que sans rien dans les mains, il avait l'impression qu'il lui manquait quelque chose.

- Un vrai d'vrai cuis'ner ? c'vous qu'prép'rait t'ça ?

Il reposa le toast soigneusement et se tourna vers lui avec un air suppliant :

- C'qu'vous p'sez qu'j'p'rrais v'nir voir ? J's'rais sage, j'touch'rais à r'en.

Est-ce que cet homme accepterait de l'y emmener, s'il promettait d'être immobile et de toucher seulement avec les yeux, comme on disait ? Il en aurait très envie et il attendait sa réponse avec plein d'espoir.

- D'où venez vous ? Monsieur...

L'homme laissa sa phrase en suspens et Nathanael avait la désagréable impression qu'il aurait dû la finir. Mais il ne voyait pas ce qu'il fallait répondre. Était-ce un test ? Il réfléchit à toute allure pour essayer de se rappeler ce qu'on aurait pu attendre de lui. Puis...

- Nathanael !

Comme il avait attiré les regards autour de lui, il se tassa sur lui-même et reprit plus doucement :

- J'veux dire : M'sieur Nathanael Fedrilla.

Et il évita soigneusement la question sur ses origines, en espérant que son oubli soit passé discrètement et que le cuisinier n'insisterait pas à ce sujet pour en savoir plus.

Wald fut très surpris de voir les yeux de son interlocuteur pétillants d'admirations pour son travail, à force il finirait vraiment par prendre la grosse tête face à tant de compliment. A croire que c'était son destin de devenir cuisinier.
Il est vrai qu'après réflexion, certes, l'ambiance des cuisines émanaient de l'agitation, alors qu'il préférait largement le calme cependant, le travail d'équipe fut ce qui avait fait pencher la balance du bon côté lors de son arrivé.
Même si il n'était qu'un simple moussaillon sur ce navire, il aimait bien savoir qu'il aidait à contribuer à ce but commun : ravir les invités avec leurs plats. Et cet homme était la preuve même qu'ils avaient réussit à l'atteindre.

Même si tout cela le flattait intérieurement et qu'il pouvait le remercier par une petite visite aux cuisines, il doutait fortement de sa promesse. Même si il l'appréciait, il ne voulait pas vraiment s'attirer le courroux de Yonnel si cet homme venait tout de même à manger en piquant de la nourriture dans les plats. De plus, un noble souhaitant visiter les lieux était la source même de la présentation du buffet était bien impressionnant et il fallait avouer très rare. Donc, il hésita un moment puis finir par dire :

- Pour votre plaisir, j'essayerais de vous faire une légère visite mais je ne peux encore vous l'assurez complètement.

Même si il était loin d'être sûr à cent pour cent d'être en face d'un véritable noble lioffelois, lorsque l'homme se nomma, Wald fit la révérence souriant :

- Enchanté de faire votre rencontre, Monsieur Nathanael Fedrilla. Je me nomme Wald Cezare.

Puis en le prenant comme un fin gourmet, il prit une de ces minis tartelettes pommes cannelles pour la lui tendre :

- Vous avez goûtez à ça ? Tenez et dites moi votre avis.

Une visite aux cuisines.

Les yeux de Nathanael pétillaient à cette idée. Certes, ce n'était pas un oui assuré, mais c'était un peut-être. Peut-être. Peut-être ! Cela lui suffisait pour le moment. La simple idée d'être - sans doute - autorisé à aller rencontrer les autres cuisiniers le ravissait. Est-ce qu'il pourrait les regarder faire ?

Voir comment les cuisines fonctionnaient, quand d'autres comme lui mourraient de faim dans la rue. Cette idée réveilla un goût amer qui remonta sur sa langue et qui le fit redescendre sur terre. Sur ce buffet, il y avait plus de nourriture qu'il n'en avait jamais vue. C'était merveilleux ! - mais pas tant que cela. Parce qu'il y en avait bien plus que ce qui pourrait être mangé ce soir par tous ces invités. Mais alors... Soudainement, très inquiet il releva les yeux vers le cuisiner, en s'appliquant pour ne pas écorcher ses mots - ou au moins, le moins possible :

- Quand l'bal s'ra fini, où qu'vous allez met' tout c'manger ? Dites, vous... l'mett'rez pas à l'poubelle, hein ?

Maintenant qu'il en avait pris conscience, cela l'inquiétait beaucoup. Toute cette nourriture. A la poubelle. Pourtant, il sentait bien au fond de lui que c'était ce qui allait se passer. Les repas royaux devaient faire beaucoup de restes, quotidiennement. Et les rues n'en voyaient pas la couleur. Jamais. Il était bien placé pour le savoir, lui qui y habitait.

Son interlocuteur se présentait le sortit de ses pensées et déplissa son front. Wald Cezare.

- C't'un plaisir d'vous rencontrer, Monsieur Wa.ld.e.

Soudain, l'homme se tourna vers le buffet pour prendre une des tartelettes à la pomme. De la pomme, en tarte. Avant son arrivée au palais, il n'aurait jamais cru que cela serait possible. Il n'en revenait toujours pas. Il prit la tarte timidement. Il n'avait pas encore goûté, en effet, mais même lui commençait à se dire qu'il allait devoir arrêter de manger. Toute faim qu'il avait en arrivant, son ventre s'était petit à petit rempli et... aussi étrange que cela pouvait paraître pour lui, il... n'avait plus faim ? Il était... rassasié ?

Un sourire béat se peint sur son visage.

C'était la première fois de sa vie que son ventre lui disait qu'il avait trop mangé plus que pas assez. C'était une drôle sensation, très agréable à ses yeux somme toute. Il prit cependant la tarte à la pomme. La dernière. Il devait donner son avis. Il croqua alors dedans :

- C'est très bon ! conclut-il ensuite ! A quelle heure j'pourrais aller voir l'cuisines 'vec vous, alors ?

Wald vit comme de la pitié et même de la tristesse dans les yeux du videur de plat qui avait d'ailleurs finit par avoir la pense bien pleine. Ce sentiment l'impressionna, il n'avait encore jamais rencontrer un noble lui montrer tant de peine pour ce problème qui était le gaspillage. Il chercha quant même à alléger la vrai situation mais voulut rester franche :

- Nous essayons au mieux de ne faire de gaspillage... Mais en effet, il sera bien difficile de l'éviter pour un bal comme celui-ci...

Il regrettait déjà les tonnes de nourritures partirent en composte alors qu'elles restaient parfaitement bonnes pour servir de repas à tous ceux vivant dans les bas fonds de Lioffel. Encore ce goût amer en bouche qui refit surface, mais il ne pouvait rien n'y faire et le savait.

Toute fois à son arrivée aux cuisines, il avait garder en tête ce que le chef lui avait dit à propos de ces fameuses restes. Wald avait finit par s'arranger avec lui pour en reprendre une partie afin de les donner à ceux qui en avaient réellement besoin. C'était la seule chose qu'il pouvait faire pour eux. Il souhaitait intérieurement et surtout sincèrement que les jeunes gamines étaint en ce moment même trouver une autre bonne main généreuse ne voulant que leur venir en aide... Qu'est ce qu'il donnerait pour savoir si elles allaient bien...

Il reprit ces esprits. Puis, le jeune homme sourit à ce compliment prouvant une nouvelle fois que sa cuisine était bonne, les conseils de son frère à ce propos ne l'avaient donc pas tromper. L'homme revint tout de même sur le sujet de cette visite, à croire qu'il en frétillait d'impatience à l'idée de se trouver dans les cuisines.

- Et bien... Nous pourrions nous retrouvez ici pour vous emmenez aux cuisines dans...- il réfléchit et finit par ajouter - une heure ? Cela vous convient ?